La cérémonie des World’s 50 Best Bars cru 2018 s’est déroulée le 3 octobre dernier à Londres. Cet événement fêtait sa 10ème édition : les organisateurs souhaitant proposer un “guide ultime” des bars dans le monde. Si initialement le classement se résumait à 50 bars, depuis 2015 c’est bien 100 bars qui sont référencés avec une pré-liste officialisée (du 100ème au 50ème) un mois avant la cérémonie présentant les 50 premiers. Pour connaître le classement entier, nous vous invitons à le consulter sur le site officiel, nous allons plutôt vous proposer une analyse sur les résultats de cette tant attendue liste qui fait la pluie et le beau temps dans l’industrie du bar.
D’abord, les World’s 50 Best Bars, c’est 510 juges travaillant dans l’industrie du bar, allant de bartenders aux auteurs de livres thématiques en passant par les cocktails enthusiasts ou influenceurs. Le panel des juges étant répartis de la sorte :
- 150 juges européens,
- 140 juges Nord et Centre américains,
- 115 juges asiatiques,
- 40 juges Sud américains,
- 35 juges moyen-orientaux et africains,
- 30 juges océaniens.
Chaque juge doit sélectionner 7 bars dont au moins 3 en dehors de leur pays de résidence, les juges doivent au moins avoir visité les bars qu’ils sélectionnent dans les 18 derniers mois et, bien entendu, n’avoir aucun lien avec les établissements pour lesquels il vote.
Les bars qui se sont le plus distingués
Parmi les bars primés, nous pouvons constater que le top 5 du cru 2018 correspond au top 5 du cru 2017, à l’exception du bar “Manhattan” (Singapour) qui était 7ème l’année passée. Dans sa globalité, on retrouve 26 bars en tout qui “stagnent” vis à vis du classement 2017 avec plus ou moins 5 places de gagnées ou de perdues.
Au-delà des bars ayant disparu cette année du classement, les grands perdants de 2018 sont en majorité américains :
- PDT (New York, USA) : – 45 places,
- Imperial Craft (Tel Aviv, Israel) : – 44 places,
- Aviary (Chicago, USA) : – 42 places,
- The Broken Shaker (Miami, USA) : – 42 places.
Les cinq plus belles entrées dans le classement 2018 sont respectivement :
- The Old Man (Hong Kong, Chine) : 10ème
- Coupette (Londres, UK) : 18ème
- Sober Company (Shanghai, Chine) : 51ème
- Presidente (Buenos Aires, Argentine) : 53ème
Et les plus belles progressions pour les bars déjà primés en 2017 sont :
- Scout (Londres, UK) : 28ème (+ 53 places)
- Swift (Londres, UK) : 46ème (+49 places)
- Three Sheets (Londres, UK) : 29ème (+42 places)
- Salmon Guru (Madrid, Espagne) : 47ème (+35 places)
Coté français, on pourra noter les entrées de Danico (73ème) et du Dirty Dick (92ème) au classement 2018 : le Dirty Dick absent du classement 2017 faisait partie du classement 2016 à la 67ème place. Malheureusement, les bars Little Red Door (33ème) et Candelaria (42ème) perdent respectivement 22 et 23 places vis à vis de leur classement de 2017. Seul le Syndicat se distingue positivement grâce à ses 10 places de gagnées, en se plaçant 24ème du cru 2018.
Deux pays et deux villes trustent le classement
La première lecture du classement des 100 meilleurs bars au monde démontre principalement que deux pays sortent du lot : les Etats-Unis (22 bars) et la Grande Bretagne (15 bars). Les deux pays comprennent, à eux deux, 37% des 100 meilleurs bars au monde !
Si l’on détaille un peu plus et que l’on se situe au niveau des villes, New York et Londres sont les grandes vainqueures de ce classement avec 13 bars chacune figurant dans les 100 meilleurs, on peut en conclure qu’un quart des 100 meilleurs bars au monde sont situés à New York et Londres. Ces deux villes pouvant être donc considérées comme les capitales du cocktail. Il est à noter que Singapour (ville état) qui était le troisième pays est aussi la troisième ville. Paris quant à elle, se retrouve 4ème ville ayant le plus de bars côtés avec Candelaria, le Syndicat, Little Red Door, Danico et Dirty Dick.
Mis à part San Francisco, São Paulo et Mexico, les villes comptant plus de 3 bars figurant dans le top100 font partie des 20 villes les plus visitées au monde. Cependant, nous connaissons tous l’attractivité de ces trois villes qui présentent aussi une forte activité touristique. Il est à noter aussi que des villes telles que New York, Londres et Paris accueillent de gros événements de l’industrie tels que la London Cocktail Week, le Whisky Live, Cocktail Spirits, …
Une exception qui confirme la règle : aucun bar de la Nouvelle Orléans n’est présent dans la liste des meilleurs bars au monde alors que la ville accueille le festival incontournable Tales of Cocktail.
En Europe, on retrouve 36 bars dans le classement des 100 meilleurs bars, en voici la répartition par ville et par pays :
On s’aperçoit qu’en Europe, Londres est la ville qui pèse le plus et de loin sur le reste de l’Europe faisant ainsi du Royaume Uni le pays européen le plus important dans le monde du cocktail. Paris et Barcelone étant aussi bien représentées, elles influent aussi sur l’importance de leur pays respectifs.
En Amérique, on retrouve 33 bars dans ce classement avec la répartition suivante par pays :
Ici, on constate froidement que la majorité des bars représentant le continent américain est localisée aux USA.
Suite au constat que certains pays et région du monde sont sur-représentées, nous vous proposons de comparer les deux graphiques suivants. Le premier représente la répartition du nombre de bars présents dans le classement par région du monde et le second représente la répartition du nombre de juges par région du monde :
Ici, il est intéressant de constater que les deux graphiques sont sensiblement identiques et que les juges provenant des régions du monde avec le moins de bars représentés ont sûrement reporté quelques voies vers l’Europe.
Cet exercice démontre aussi que pour les juges devant sélectionner 7 bars (dont minimum 3 en dehors de leur pays de résidence) ont une tendance à sélectionner les bars situés dans leur région du monde. Cela s’explique surtout par le fait que l’on voyage plus facilement dans nos pays voisins que dans d’autres continents du monde.
La répartition du nombre de juges influence donc grandement les résultats finaux des classements proposés. Si nous ajoutons aussi à cela, l’attractivité d’une grande ville touristique puisqu’un juge peut profiter de ses vacances pour visiter les bars à cocktail, il n’est donc pas étonnant de voir les grosses villes touristiques sur-représentées. Mais cela peut aussi avoir un gros impact pour les bars à cocktails situé dans des villes moins touristiques car il y a peu de chances pour qu’ils puissent attirer les juges et qu’ils fassent le voyage pour les découvrir. Nous pensons tout bonnement à des villes comme Bordeaux, Lyon ou Montpellier parmi lesquelles nous pouvons trouver des bars de très bonne qualité pouvant représenter dignement la France.
Si nous connaissons la répartition des juges par région du monde, nous ne possédons malheureusement pas la répartition des juges par pays. La sur-représentation des bars américains et anglais pouvant nous laisser penser à une présence plus importante de juges dans ces localisations. Mais cela reste une hypothèse.
Pistes et réflexions sur les axes d’amélioration
Apporter des axes d’amélioration sur un tel concours reste très compliqué. Les juges sélectionnés doivent être capables de voyager tout au long de l’année, de traverser des océans régulièrement et surtout de ne pas se limiter aux grosses métropoles touristiques. Ils doivent être également légitimes, à savoir avoir une très grande connaissance du bar et des cocktails qui ne se limite pas à une simple expérience client.
Une part d’inégalité provient de la répartition des juges dans le monde, il faudrait pouvoir rendre plus équitable cette répartition, quitte à réduire le nombre global de juges. Le nombre de bars à sélectionner est aussi à revoir pour une meilleur équité car aujourd’hui les juges doivent sélectionner 7 bars en tout dont 4 maximum dans leur pays d’origine. Passer à 12 bars sélectionnés dont maximum 4 ou 5 dans le pays de résidence peut être une piste intéressante.
Une zone d’ombre persiste quant à la faculté des organisateurs de vérifier que les juges ont bien visité les bars pour lesquels ils votent. Ils pourraient, avec une simple application de géolocalisation et de check-in dans les bars, monter des statistiques sur les juges avec le nombre de bars visités dans l’année écoulée…. et leur localisation. Cela permettrait deux choses : vérifier que le juge a bien visité le bar et de donner un indice/facteur aux juges (exemple le vote d’un juge, ayant visité 120 bars dans 6 pays différents aurait de cette manière plus de poids que celui d’un juge ayant visité 140 bars dans 2 pays différents).